L’envers du décor

Par Geneviève Bertrand, le 18 Décembre, 2025

En cette fin d’année, j’ai envie de nourrir des besoins de vérité, d’authenticité et de cohérence. Parce qu’à travers nos infolettres et nos publications, on laisse surtout entrevoir la partie lumineuse: ce qu’on célèbre, ce qui avance, ce qui inspire.

Spiralis, c’est aussi une entreprise.

Et derrière toute entreprise, il y a des relations, des décisions, des angles morts… et des moments où ça coince. C’est un lieu où l’apprentissage se vit pour vrai — donc un lieu où il y a des essais, des ajustements… et parfois des décisions qui font mal.

Ce qu’on partage rarement, c’est ce qui blesse. Ce qui grafigne. Ce qui vient toucher des zones sensibles. Et pourtant, ça fait partie du chemin.

Ce n’est juste pas ce qu’on publie spontanément, pas quand on est en plein dedans. Il fallait attendre que ça cicatrise un peu. Que le courage de regarder en arrière revienne.

Et soyons honnêtes : il y a eu de la gêne. Un questionnement face aux décisions qui nous ont menés là. Le poids bien réel de devoir laisser partir des personnes qui comptaient sur leur emploi.

Et la tristesse de mettre fin à un programme de stagiaires auquel des gens s’étaient sincèrement engagés.

Et oui, au passage, on a grafigné de la confiance et du lien. Quoi que les choses soient faites dans les meilleures intentions, ça arrive. C’est humain.

Maintenant que le calme revient, je me sens prête à vous raconter ce qui s’est passé de moins lumineux en 2025. Pas pour dramatiser. Juste pour dire vrai. Par humilité.

Parce que je crois que le monde a besoin de moins de façades et de plus de vérité.

Ce qui s’est passé entre janvier et juin 2025…

2025 a commencé dans un climat instable, qu’on n’avait pas vraiment anticipé. On avait vu les élections venir — évidemment — mais on n’avait pas anticipé à quel point leur onde de choc toucherait une entreprise comme la nôtre.

Face à l’incertitude, bien des organisations se sont repliées sur elles-mêmes pour assurer leur stabilité. Normal. Quand la maison brûle, on ne travaille pas sur les relations… on sauve les meubles. Et c’est ainsi que l’onde de choc a fini par nous atteindre: Moins de demandes de formations en organisation — une source importante de revenus pour Spiralis. Il a fallu regarder les choses en face : nous n’aurions pas les moyens de garder toute l’équipe en poste et nous devions resserrer nos dépenses au maximum.

Alors on l’a fait comme on le fait pour tout: ensemble. En équipe. Dans le dialogue et la décision partagée. Avec ouverture, humilité et aussi avec maladresse. Parce que nous sommes un laboratoire vivant: un endroit où nos valeurs ne restent pas théoriques, elles se frottent au réel — même quand ça grince.

La première grande décision est arrivée rapidement: dire au revoir à Éliane, notre responsable des opérations. Un départ qui a laissé une vraie trace. Parce qu’à travers son rôle, Éliane nourrissait des besoins très concrets dans notre équipe: structure, rigueur, organisation, discernement.

Ce n’est pas rien, perdre ça. Et il a fallu vivre ce deuil sans pouvoir s’arrêter. Continuer de tenir le cap. Répartir ses tâches entre celles et ceux qui restaient. Garder la mobilisation vivante malgré la fatigue, malgré l’inquiétude, malgré le réajustement constant.

La deuxième décision difficile a été de mettre fin à notre programme de stagiaires. La réalité, c’est qu’en période de manque, nous n’avions plus les ressources pour rémunérer des personnes en apprentissage du métier. Notre équipe interne pouvait assurer l’ensemble des formations, et il a fallu ajuster le programme en conséquence.

Nous avons ouvert le dialogue, en cercle, pour accueillir l’impact que cela représentait: des personnes investies dans une démarche d’apprentissage, avec une certaine prévisibilité financière, voyaient soudain leur trajectoire changer.

Une grande vague d’émotions est montée : déception, colère, incompréhension… Et nous avons puisé en nous pour accueillir l’impact de cette décision, alors que nous étions nous-mêmes profondément ébranlé·e·s par plusieurs deuils importants.

La communauté qui gravitait autour de l’équipe permanente s’est trouvée ébranlée. Un autre deuil à traverser — pour eux, pour nous. Ce passage a été chargé.

Au-delà des rôles et des décisions, il y avait surtout des humains, des attentes, des élans, des rêves. Et même en mettant toute la délicatesse possible, certaines blessures se sont faites sentir. Notre bonbonne d’empathie et d’énergie s’épuisait.

Puis les discussions se sont poursuivies, plus profondes, plus exigeantes. Elles nous ont menés à une décision partagée : Monica quitterait son poste à temps plein pour redevenir pigiste. Monica occupait le rôle de cheffe de cercle académique — un rôle de leadership clé dans notre structure inspirée de la sociocratie. Et pour moi, comme DG, c’était une deuxième complice qui s’en allait. Un roc sur lequel je pouvais me reposer. Encore des responsabilités à redistribuer. Encore un ajustement à absorber pour ceux et celles qui resteraient.

Nous étions en mars. L’année ne faisait que commencer. Et il fallait continuer à couper. La décision ultime, la plus difficile : il fallait encore abolir un poste pour équilibrer nos revenus et nos dépenses, simplement pour éviter le déficit et préserver une certaine santé financière. Nous avons donc remis en question le poste de Geneviève Boileau… puis le mien.

Dans une gouvernance partagée comme la nôtre, avec la taille et la maturité de l’équipe, une question s’imposait : avions-nous besoin d’une directrice générale à temps plein? Ce moment-là n’opposait pas simplement des fonctions. Il engageait deux personnes, deux façons d’habiter Spiralis. Et il a fallu choisir laquelle continuerait le chemin avec l’équipe. J’étais sincèrement prête à laisser ma place, si c’était ce qui servait Spiralis. Et après de longues discussions et réflexions, nous en sommes venus à la décision d’abolir le poste de Geneviève.

J’ai gardé cette section pour la fin, non seulement en raison de l’ordre chronologique des événements, mais aussi parce qu’elle demeure sensible pour moi. La dynamique entre Geneviève et moi était déjà fragilisée au moment de tenir ces discussions, ce qui a rendu cette traversée plus délicate.

Avec le recul, je ressens de la tristesse en repensant à certains moments où ma posture n’a pas été à la hauteur de ce à quoi j’aspire. Puisque je n’ai pas encore complètement digéré cette expérience — et parce que le dialogue avec Geneviève demeure fragile — c’est ce qui me semble juste de partager pour l’instant.

Geneviève faisait partie de la famille Spiralis depuis plusieurs années. Elle a contribué à l’entreprise avec cœur, intelligence, générosité et engagement. Son départ a été un passage sensible pour nous tou·te·s — un moment inconfortable traversé dans un contexte où certaines tensions n’avaient pas encore trouvé de résolution. Et ce départ a marqué le dernier tournant de ce long processus de réorganisation. Nous l’avons franchi le cœur lourd, les jambes un peu molles… et avec la sensation d’arriver au fil d’arrivée, vidés.

Puis l’été est arrivé, avec la fin de notre année fiscale et la première édition de la retraite de Spiralis. Épuisée, j’y ai participé avec le chapeau de participante. La retraite m’a offert un espace hors du temps où j’ai pu remplir ma bonbonne d’empathie, de chaleur humaine et de repos.

PAUSE. LES VACANCES D’ÉTÉ.
RESSOURCEMENT ET LÉGÈRETÉ!

Après tous ces départs, nous avons pu goûter à un retour. Nous avons réaccueilli Valérie. Après sa sabbatique, elle est revenue nous apprivoiser autant que nous apprivoisions sa nouvelle présence. Spiralis avait changé — elle aussi. C’était un peu comme retrouver une marraine bienveillante et tout le réconfort qu’elle nous apporte. Elle est l’essence même de Spiralis. Et elle nous avait manqué.

Depuis l’automne, le soleil brille à nouveau pour Spiralis. Les expériences commencent à se déposer, les apprentissages prennent forme et la gratitude se fraye doucement un chemin en cette fin d’année. Le calme après la tempête.

Avec le recul qui commence à s’installer, je vois émerger des constats puissants, un leadership plus libre, plus humble, plus collectif. Et ça continuera de se préciser encore longtemps. Je vous garde la suite pour 2026!

— Geneviève Bertrand
Directrice générale chez Spiralis


Ce texte a été délicat à écrire… Il est tout aussi délicat de le publier. Je suis sensible à l’impact qu’il peut avoir sur les personnes concernées. Je ne sais pas qui le lira, comment il sera reçu, ni quel impact il aura.

Ce que je sais, c’est qu’en l’écrivant, j’ai pris soin de mes besoins de vérité, d’authenticité et de cohérence. C’est mon intention, au plus clair de son expression.

Je suis réellement disponible pour accueillir l’impact, vos réflexions ou ce que ce texte aura touché en vous. Invitation au dialogue : gbertrand@spiralis.ca

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